Jeudi après-midi, je suis allé voir mon grand-père au cimetière du Montparnasse. C'était assez terrifiant. Je ne savais pas quoi dire, ni faire devant le marbre gris et froid. Les seuls souvenirs qui me revenaient en mémoire étaient ceux de l'enterrement... Un jeune homme priait non loin de là devant le caveau de sa famille. Il priait avec intensité et application. Je l'ai envié sur le moment. Il savait ce qu'il avait à dire, quelles paroles exactes il devait prononcer. Il n'hésitait pas. Il savait pourquoi il était là.
Jeudi soir, je suis allé avec ma douce voir
The Last Show, l’ultime film de
Robert Altman, récemment décédé. Une émission de radio vit ses dernières heures avant la vente de la chaîne qui la diffuse à un groupe texan. L’animateur, qui improvise des slogans publicitaires désuets et accompagne les chanteurs country ou blues, enrobe son show d’une voix de velours et d’un sens de la formule d’homme du Midwest. «
Priez pour qu’il pleuve et gardez votre humour au sec», dit-il avec un humour teinté de mélancolie. Le film est un magnifique adieu à la scène, un adieu au spectacle. Robert Altman tire sa révérence avec une certaine nostalgie, mais sans aucune amertume.
The Last Show ressemble à une de ces fanfares noires qui accompagnent les convois funéraires à la Nouvelle Orléans : c'est un joyeaux bordel qui célèbre la vie du défunt, mais qui continue à jouer malgré la peine. Mon grand-père aurait adoré ce film. Et du coup, il était plus présent dans cette salle de cinéma que dans le cimetière. Et moi, je savais pourquoi j’étais là.